VENISE AUTREMENT

Tout en rendant hommage aux architectes des doges, l’artiste a apporté sa touche personnelle, son regard empreint d’une certaine naïveté à l’égard des lignes et de la composition, ses couleurs accrues. Il découle de cela des instants de pure poésie qui éclairent des tableautins carrés réalisés à l’huile à la manière des Anciens.

 

Les interprétations de la ville de la lagune sont innombrables, alors en quoi celles de Katia de Carvalho différent-elles des autres ? Et bien la réponse est simple. Elles portent toutes la sensibilité de l’Amérique du Sud, du Brésil plus précisément, pays d’origine de l’artiste. Ceci leur confère une luminosité particulière ainsi qu’une chromatique spécifique.

 

Si Venise elle-même est née de la rencontre de l’Orient et de l’Occident, les tableaux que Katia de Carvalho a peints y apportent le souffle du Nouveau Monde. Ce mélange culturel témoigne qu’en fonction de ses racines, les regards portés sur des objets se nourrissent de traditions ancrées dans les gènes. Ceci laisse penser que les images même de notre quotidien peuvent être perçues autrement selon les fondements de nos éducations, sans pour autant que des jugements ou une échelle de valeurs puissent être émis.

 

En regardant cette « Venise », il faut laisser voyager son imagination sans retenue.

 

Patrice  Allanfranchini

Journaliste, historien, critique d’art

(Publication 12/2004)

LE THÉÂTRE DE LA MÉMOIRE

La peinture de Katia de Carvalho reste suspendue entre la vérité et la fiction: trop réelle pour être une dérivation de la fantaisie, elle est, cependant, extraite de l’expression phénoménique par le recours à des libertés anatomiques et de perspective qui produisent une vision de rêverie, parfois à touche naïve, pour évoquer la nature, la ville et l’être humain.

 

Le travail de l’artiste peut être subdivisé en deux mondes thématiques: ceux de paysages urbains et de sujets ruraux. L'artiste a consacré une grande partie de son travail à Venise, reproduisant les façades des palais tels des draps étendus entre l'air et l'eau : voici des arabesques bidimensionnelles au premier sens du terme, comme si la toile était un hommage toponymique d’un étudiant en architecture.

 

Contrairement à ce que l’on trouve en général chez les « vedutisti » ou peintres de paysages qui nous viennent tout de suite à l’esprit, Venise ne sert pas de simple coulisse aux célébrations usuelles de la vie et du pouvoir: les jeux de prestige ont disparu dans les perspectives, tout comme la touche « Goldoniano » ou l’aspect folklorique.  Katia de Carvalho nous rappelle davantage Monet, reprenant des sujets identiques pris sous des lumières différentes et à des moments différents de la journée.

 

Ainsi, l’essence des tableaux de Katia de Carvalho est  théâtrale.  Des tableaux qui prennent racine dans l’antinomie de l’art vénitien du 18e siècle, dans les superbes perspectives extérieures du Canaletto et dans les vues plus méticuleusement intimistes de Longhi, le tout caractérisé par cette touche personnelle inspirée par le fil rouge de la mémoire et du souvenir.

 

 

Extrait critique d’art auteure Cinzia Bollino Bossi/2008